ACTUALITES NEPHROLOGIQUES
NECKER 2016
Les 25-26 avril 2016, se sont tenues à l’Institut Pasteur, les Journées annuelles d’Actualités néphrologiques de Necker. Parmi les cent soixante néphrologues et spécialistes (transplanteurs, cardiologues, internistes, généticiens, diabétologues) présents, un tiers est venu de l’étranger (Belgique et Maroc en tête). De notre échange avec des praticiens du Burkina-Faso et du Cameroun nous avons appris qu’il n’y a pas de transplantation chez eux ; des patients en stade terminal sont envoyés en France. Dans de nombreux pays en voie de développement alors que les néphropathies aigues dues aux infections son fréquentes, les insuffisants rénaux ne sont pas traités et il n’y a pas de pédiatrie spécialisée. La dialyse se développe au Maroc, en Tunisie. En Egypte, la greffe par donneur vivant, encouragée, connaît le succès. Les médecins notent l’incidence des pratiques religieuses sur la santé : lors du ramadan le jeûne suivi de l’absorption massive de sucres entraînent souvent du diabète, des ophtalmies et l’insuffisance rénale.
Des internes et doctorants étaient présents : actuellement neuf par promotion se destinent à la néphrologie ; ils seront douze dès la rentrée prochaine.
Ces Journées offrent l’occasion de rencontres et d’échanges entre les praticiens, les laboratoires pharmaceutiques partenaires (Alexion, Amgen, Astellas, Baxter, Chiesi, Fresenius medical care, Genzyme, Meditor, Novartis, Roche) et les associations de patients : PKD, AIRG, FNAIR, Maladie de Fabry…
Elles font le point sur l’actualité de la recherche, des pratiques et des traitements en cours, et en dressent le bilan et les perspectives.
D’année en année on mesure les progrès de l’imagerie médicale et des méthodes d’exploration non invasive : telle ici la microscopie in vivo sur les souris, où l’on peut suivre en direct par photofluorescence l’activité cellulaire.
La visualisation par élastographie ultrasonore, permet d’évaluer par le coefficient de compression l’élasticité du rein pour établir, mieux que la palpation manuelle, le pronostic d’obstruction rénale, vasculaire ou suivre la santé du greffon dans le temps.
Un exposé sur la médullaire rénale a montré la complexité et la densité des échanges vasculaires, tubulaires, par contre-courants actifs et passifs dans un rein unilobé de rat.
Puis ont été traités la fibrose rénale et sa progression, la fréquence des maladies rénales chroniques dans la population générale, leur prévalence au Maroc (programme MaReMar). Présentant l’enquête épidémiologique CKD-Rein, lancée fin 2012, sur un échantillon de 3000 patients éligibles, suivis sur une durée de cinq ans (fin avril 2016-2021) par 40 sites d’investigations, le Dr Bénédicte Stengel annonce un formidable outil d’information et de recherche à la fois bio-médicales et socio-économiques ainsi qu’un suivi sur les pratiques cliniques. Les résultats seront conservés à la Bio-banque de Picardie.
Un point est fait sur des atteintes néphropathiques glomérulaires, les atteintes rénales des cryoglobulinémies de type 1, puis les succès et les échecs concernant la Maladie de Fabry, et la fibrodysplasie rénale.
Le laboratoire Amgen lance le débat sur la prise en charge du risque lipidique du patient insuffisant rénal : faut-il traiter ou pas ? La statine qui a été récemment mise en cause est défendue par le Dr Danchin, cardiologue, qui reprend l’historique et les statistiques. Pour faire baisser le LDL, il faut agir tôt avec une forte dose de statines ; si on arrive à un stade avancé de la formation des athéromes l’anti-cholestérol n’est plus efficace. Le futur est-il dans le traitement par PCSK9 ? On étudie la population rarissime des hypocholestéromiques de naissance (gène muté dans population noire, non repérée car saine (3 ou 4 cas dans le monde) ils seraient 0,14 %) ; le rôle physiologique de cette carence de LDL n’a pas été étudié sur le rein ; il est en cours sur le foie.
Concernant la dialyse : la simulation médicale est envisagée pour les nouveaux personnels des centres d’hémodialyse. puis l’on évoque le retour à la dialyse et la vie du patient après l’échec de la transplantation. Enfin le coût de ce traitement supplétif a été soulevé par la Cour des comptes. Le Dr Zambrowki s’élève contre telle évaluation comptable : « il ne faut pas abandonner la question à de fins analystes financiers. » Les estimations sont toujours en retard sur le présent. Résumons-les ici :
Le tableau de la CPAM de 2007 pour 2010 évalue à 60.000 dialysés en France pour un coût global de 4 milliards d’euros.
Hospitalisation 66.425 → les dépenses hospitalières représentent l’essentiel des coûts.
Honoraires 3.317
Auxiliaires 1.229
Biologie 1.668
Pharmacie 4.037
Dispositifs médicaux 584
Transports médicalisés 11.247 → on dépense autant en transport que pour l’ensemble des examens
Autres soins en ville 200
total = 88.608
Coût de la dialyse péritonéale = 22.000
2009 : la dialyse périnéale est moins chère : auto dialyse à domicile = 7.253 € / mois
DP au centre de dialyse = 4.377 € / mois
L’écart entre DP et hémodialyse est de : 13.300 €
Mais s’agit-il des mêmes patients ? Si les frais liés aux autres hospitalisations diffèrent, les dépenses pharmaceutiques montrent moins d’écart (traitement de l’anémie).
En France, le taux de DP stagne autour de 7%. Il recule même dans certaines régions (Besançon : de 23 % à 19 %). Il faut développer la dialyse à domicile.
La prise en charge de l’IRC est devenue une priorité, avec 71.500 patients IRT (2012), dans la répartition des coûts et dépenses pour les Maladies chroniques.
Dans ces évaluations, il ne faut pas oublier les patients qui souffrent d’une double peine économique : la dialyse appauvrit les ménages. Les soins coûtent, et l’employabilité est mise à rude épreuve voire impossible.
Pour 73.500 IRT coût brut = 3,8 milliards d’€ : 41.000 sont en dialyse = 3,1 milliards
31.000 greffés = 0,7 –
Augmentation du nombre de malades IRT : 5% par an.
Les priorités économiques et politiques sont-elles bien posées ? Les transports représentent 18 % du coût = le double des médicaments (9 %). Le tarif excessif des ambulances et certaines pratiques seraient à revoir (covoiturage).
COUT ANNUEL MOYEN D’UN PATIENT : de 44.840 € jusqu’à 65.091 €.
L’IRT représente 2,1 % des dépenses maladie : 3.088 des 147 milliards / an pour 0,06 % de la population.
Le coût en France est le plus élevé d’Europe (le double qu’en Allemagne et en Belgique). Le Royaume-Uni est le parent pauvre avec un tarif 2 à 3 fois moindre, les patients ne sont pas traités passé 75 ans (20 % sont dialysés à 75 ans) : « avec moins on fait moins ! »
L’IRT est la seule maladie prise en charge par Medicare aux Etats-Unis.
Un plan d’économie tend à faire baisser les tarifs. Mais le reste à charge des patients tend à augmenter régulièrement. On note des écarts d’honoraires (pas toujours justifiés) entre secteurs privé / public.
Les Associations des patients s’inquiètent pour les patients et pour les professionnels : il est inacceptable de se faire dicter une conduite de vie et de santé à partir d’éléments purement comptables !
Un Rapport sur la dialyse par la Société francophone de néphrologie est en cours de rédaction.
Parmi les nouveaux traitements, la pharmacogénétique et une meilleure connaissance des récepteurs cannabinoïdes endogènes ouvrent des pistes.
Sur la transplantation, sont exposés les lymphocytes B – la nouvelle vision de la compatibilité HLA (reconnaissance des épitopes par les anticorps à la surface des antigènes) – les risques à long terme pour les donneurs vivants (KDigo international work group –guide en ligne des critères médicaux de décision de greffe, 130 p. : http://kdigo.org/home/guidelines/livingdonor/).
Concernant les vaisseaux, la stimulation carotidienne et les embolisations rénales thérapeutiques ouvrent des pistes nouvelles.
Le compte-rendu des journées et les diapositives seront mises en ligne sur le site de la Société de Néphrologie, Actualités néphrologiques Jean Hamburger de Necker, en juillet 2016.
Martine
PKD / AIRG