ACTUALITES NEPHROLOGIQUES DE NECKER 2017

24 et 25 avril 2017

Institut Pasteur, Paris

 

 Notre association ne manque pas ce rendez-vous d’information scientifique annuel où elle tient un stand créateur de rencontres toujours plus nombreuses.

La réflexion a été menée par 23 orateurs de diverses disciplines autour de ces grands thèmes :

– Insuffisance rénale aiguë

– Energie

– Pression artérielle

– Glomérulonéphrite

– Métabolisme des phosphates

– Oncologie

– Transplantation

– Malformations vasculaires

 

Nous résumerons ici quelques-unes de ces communications.

 

Session Pression artérielle :

– L’hypotension orthostatique (hO) 

La pression artérielle à ne pas dépasser pour la santé de nos rein est fixée à 140 / 90.

L’hypotension orthostatique touche 6 % de la population générale. Elle est due à l’âge (pour les plus de 65 ans, il y a une variation de 5 à 30 % selon que la personne est en ambulatoire ou en institution), au diabète (10 à 20 %), à des causes neurologiques (Parkinson, +35 %), au tabac, à la maigreur, au sel, aux effets médicamenteux. L’hypotension entraîne deux fois plus de risque de comorbidité que la HTA.

Le risque de mortalité est associé à des pathologies sous-jacentes (neurologiques …).

Le différentiel important entre le très hypertendu couché et l’hypotension debout induit des événements perturbant les fonctions cardio-vasculaires, rénales, cérébrales, avec parfois un risque de mortalité par un effet dose.

Physiopathologie du débit cardiaque : 500 à 700 ml de sang sont stockés dans la partie inférieure au lever avant que ne s’amorce le retour veineux : c’est la chute systolique immédiate suivie de mécanismes compensateurs qui rétablissent la circulation sanguine. Pour se réguler la fréquence cardiaque. Ce système régulateur fait intervenir les deux boucles de rétrocontrôle du baroréflexe. Les barorécepteurs du système sympathique régulant la circulation veineuse et l’artérielle sont situés dans les sinus carotidiens, le sinus de l’aorte, l’oreillette droite du cœur et les récepteurs intra-rénaux. Ces quatre systèmes réflexes stimulés lors des changements de pression sanguine sont impliqués dans l’hypotension orthostatique.

 

Signes cliniques :

– « La tête qui tourne », une douleur dans les épaules, une impression de ralenti, un trouble de la vision, des signes de fatigue, de nausée, une sueur. Ces signes sont plus sévères le matin, dans les 3 minutes qui suivent le lever, après un repas, lors de la consommation d’alcool, en cas de chaleur. L’hypotension est immédiate : dans les 30 secondes qui suivent le lever : il faut se lever lentement ; elle peut être retardée – dans les 10, 15 minutes après le lever.

– La syncope réflexe (chute) ou « malaise vagal »

– La tachycardie orthostatique

– Intolérance à la position statique debout

 

On distingue l’hypotension orthostatique neurogénique (accélération cardiaque, hypovolémie, problème de la boucle réflexe : intolérance orthostatique). C’est un  dysfonctionnement du système sympathique et des neurones sympathiques (biosynthèse des catécholamines).

Ou non-neurogénique : origine médicamenteuse (traitements antihypertenseur, bétabloquant, alpha bloquant, diurétique, antidépresseur, neuroleptique, antiparkinsonien, vasodilatateur, cumul de médicaments), causes médicales : prostate, hypovolémie …

 

Prise en charge : Education du patient : s’hydrater beaucoup, manger salé, contraction des muscles, croiser les jambes, compression veineuse (bas de contention) … Pharmacologie : Gutron + Flucortac ; Droxidopa.

 

– Hypertension (HTA)

C’est un gros problème dans le monde avec un risque important de mortalité cardio-vasculaire auquel on peut remédier. L’enjeu thérapeutique est de diminuer la pression sanguine artérielle pour diminuer les accidents cardio-vasculaires en faisant dialoguer néphrologue, cardiologue, hypertensiologue. Mais, pratiquement, il est impossible de traiter toute la population hypertendue (il y a, par ex, 400.000 personnes hypertendues en Normandie !)

 

En 2009 la cible était inférieure à 135 / 85. Actuellement le guide de référence en France prescrit une mesure maximale de 140 / 90. Mais cela ne convient pas en néphrologie : pour les IRC, il faut viser un objectif plus bas.

La prise de tension artérielle soulève aussi un point de méthodologie (types d’appareils, automesure…). La prise de mesure par le médecin ou en son absence du médecin par relevé automatisé montre une différence de 15 mm.

Des études sur le patient hypertendu IRC et sur l’IRC ayant eu un accident vasculaire cérébral hémorragique restent à entreprendre. La HTA est une des causes de l’IRC. La prévention est à développer et chez le praticien et chez le patient.

 

Session Oncologie :

Le cancer du rein est le septième en France pour la fréquence. En 2012 on comptait 11.573 nouveaux cas (dont 67 % d’hommes) ; soit une augmentation de 2% pour les hommes, 1,7 % pour les femmes). Il est cause de 4000 décès par an. Le tabac, l’hypertension, l’obésité ont un impact sur le cancer du rein souvent découvert fortuitement.

Diagnostic :

Imagerie : L’échographie est souvent à la découverte de la tumeur et des kystes. L’échographie rénale pratiquée la veille d’une intervention chirurgicale nécessite une extension veineuse (veine hépatique rénale). Le scanner, l’IRM sont utilisés ; un uro-scanner permet de suivre la voie excrétrice EUB en trois temps. A l’hôpital Necker, le staff du mardi permet de voir ensemble toutes les tumeurs du rein du service (des microtumeurs kystiques aux autres).

Biopsie : La biopsie d’une tumeur rénale, des très petites tumeurs bénigne à la grosse tumeur, va devenir obligatoire d’ici peu, selon un protocole particulier sans risque hémorragique. Sensibilité du test : 99 %, histologie (pour graduer la tumeur) fiable 90 à 96 %. Base française URO CCR : 11 % tumeurs métastasiques, 82 % locales.  Grade nucléolaire ISUP pour les tumeurs T1 (4 cm) à T2 (10 cm). Un uropathologiste doit être affilié à chaque service d’urologie (cancers rein, prostate).

Il existe environ 38 tumeurs différentes du rein.

Une tumeur jusqu’à 4 cm est opérable. A plus de 7 cm, la tumorectomie est réservée à des centres experts. La chirurgie partielle est préconisée. L’ablation radicale, élargie, est un facteur de risque d’IRC. 26 % des patients sont insuffisants rénaux avant chirurgie. Le volume du parenchyme restant est corrélé à la fonction rénale post-opératoire.

On utilise le rénal score : pour la localisation de la tumeur (à la surface du rein, médullaire, centrale) et déterminer la zone péritumorale, la présence des graisses néphrotoxiques.

On procède par voie ouverte (lombotomie), par laparoscopie, par assistance robotique (à l’HEGP). Cet outil n’invente rien, mais son geste sans être nécessaire est utile, net, précis. L’ablation peut être percutanée, transcutanée. On recourt à la radiothérapie pour les micro-tumeurs, les ondes électromagnétiques (500 kHz), la thermoablation (T – 3,5 cm), à la cryo-ablation (-40°C) surtout pour le patient de + 70 ans. La chirurgie partielle peut entraîner des récidives.

Le traitement du cancer du rein est chirurgical ; on ne dispose pas à ce jour de traitement néo-adjuvant. Aujourd’hui il y a rémission à dix ans.

Recherche : Le protocole CARMENA est en cours d’inclusion (450 patients – HTA, syndrome pied/main, digestion …). A l’avenir, il faudra définir mieux les séquences des bases moléculaires métastasiques que l’on sait déterminer mais non traiter ni opérer. Il y a 4 caractérisations moléculaires. Le dogme de la néphrectomie élargie est caduc. L’ablation des petites tumeurs est pratiquée. L’oncologie voit l’émergence des thérapies ciblées, et l’utilisation d’inhibiteurs.

Il existe des marqueurs (épitopes) dans les urines mais ils ne sont pas pris en compte. Les échantillons d’urine ne sont pas conservés dans les tumorothèques. C’est un manque. L’exérèse complète de la tumeur implique une étude complète, qu’en est-il de la biopsie du greffon pour la recherche de tumeur ? 34 % des tumeurs sont repérées sous biopsie.

La surveillance du patient opéré exige des démarches encore agressives ; pour le patient âgé on se limite à un suivi échographique, IRM. La radio fréquence ou la chirurgie suppléent à la récidive.

Les effets secondaires des traitements antinéoplasique peuvent entrainer des microangiopathies thrombotiques médicamenteuses (MAT), atteintes du complément (SHU) , des micro adénopathies hémolytiques (anémies), une thrombocytopénie périphérique, une défaillance organique sévère, une HTA maligne qui ont un impact sur l’IRC et IRT. 11 % des patients qui ont un déficit sévère post chimiothérapie. On surveille les anti-VEGF pour éviter le syndrome pré-éclampsie. Gemcitabine + TMA sont des bloqueurs du complément ; ce traitement améliore la fonction rénale. Les inhibiteurs du protéase (IP) + TMA ont conduit des patients à la dialyse. Mais on ignore le nombre d’IRC sur les patients traités. Comment distinguer entre comorbidités associées aux médicaments antinéoplasiques (K + HTA, + sympômes pulmonaires + IR, … lors de prises en charge différentes ?

 

Prospective

Laissant de côté le courant transhumaniste de la Silicone Valley qui rêve de transformer l’homme avec des organes bioniques, considérons le développement pour les dix ans à venir d’une nouvelle médecine s’appuyant sur des médicaments et outils inédits. Le traitement du cancer s’appuiera sur la nanomédecine et les nanotechnologies, la génétique impression 3D, l’imagerie moléculaire, la bio-informatique, le NVIC, la médecine digitale.

Avec la médecine moléculaire, la cible de la radiothérapie et de la chimiothérapie sera le noyau de la cellule tumorale. Anticorps monoclonaux, micromolécules seront les médecines spécifiques contre les effets secondaires résistants. La nanomédecine met au point des molécules de l’ordre du nanomètre dont elle évalue les principes actifs afin de mesurer les toxicités.

Aujourd’hui il faut moins d’une demi-heure pour séquencer un génome complet (25.000 gènes, 3 millions de paires et bases). La protéomique, la médecine génétique et épigénétique, l’épigénomique se développent. Les « epidrugs » (aux sels de platine et autres) sont des inhibiteurs contre les résistances. La pharmacogénomique s’appliquera selon les patients.

En 2005, Dr Judah Folkman (Prix Nobel) a décrit l’angiogenèse tumorale. Les cellules souches interviendront dans l’immunothérapie pour restaurer les tissus et organes lésés, remplaçant les cellules tumorales. Le biopen ensemencera dans un gel les cellules souches (ex dans la reconstruction du cartilage, du larynx).

La médecine 3D : le Spritam (antiépileptique) est le premier médicament fabriqué par impression 3D, a été approuvé par l’agence de biomédecine en 2016. On fabriquera à la demande la formule et la dose de gènes, ADN, bactéries synthétiques, protéines plasmatiques. On pourra modifier la formule du médicament en appliquant des thérapies ciblées, à l’intention de petits groupes de pathologies ou de patients spécifiques. 2400 centres participent à ces recherches et ces tests de laboratoire. Les xénopatients vont redéfinir la recherche clinique.

Dans le microbiote existent des bactéries carcinogènes (cancer des polypes, dégénérescence, inflammation chroniques). L’irradiation maîtrisée par un robot-cible reportera l’immunité tumorale du cancer à son environnement par des mouvements ablatifs et destructifs des cellules tumorales (pour le cancer pulmonaire localisé, la prostate en 5 séances, le cerveau). Le robot s’adapte et neutralise la tumeur selon cinq mouvements. Il s’agit de préserver l’équilibre immunitaire et l’organisme du patient par des méthodes non-invasives, non-amputatoires.

Le Théranostic est un moyen pour pratiquer une thérapie ciblée par image fluorescente sur les microtumeurs à un stade très précoce : c’est à la fois un outil de diagnostic, de traitement, d’immunisation. Le TRP IRM, le CTC, les biopsies liquides seront de précieux atouts médicaux. L’ADN circulant sera utilisé pour l’extraction de l’ADN, son séquençage et le suivi des mutations ou de la résistance des gènes au fil du temps : l’avenir médical est dans la génétique préventive. Actuellement on pratique 600 tests de génétique des familles par an. Le projet à dix ans dépend de la politique de santé qui sera mise en œuvre.

Le diagnostic s’individualise ainsi que la médecine ciblée 3 D à la demande.

Intelligence artificielle : Conçu par IBM, le robot Watson traite 200 millions de pages de textes à la seconde. L’information actualisée et l’interconnexion des bases de données améliorent la performance diagnostique, l’attribution au meilleur receveur, etc…

 

Session Transplantation :

Le diabète est une complication qui intervient chez 20 à 30% des patients ayant reçu une transplantation rénale, avec une incidence très élevée durant la première année suivant la greffe. Les immunosuppresseurs, l’immobilité post opératoire jouent un rôle majeur dans l’apparition du diabète ; les traitements inhibent le transport de glucose, ont donc un pouvoir diabètogène. Cette hyperglycémie post-opératoire est transitoire et tend à se régulariser au cours des mois suivant la greffe. Mais ce retour à la normale est plus difficile chez les personnes déjà sujettes au diabète ou souffrant de surpoids. L’immuno résistance est proportionnelle à l’âge et au poids. Malgré tout, la prise de poids après la greffe intervient chez 40% des personnes et est de l’ordre de 10 kg. Pour limiter ces effets néfastes courants, un suivi préventif des risques  permet de mieux préparer le patient.

Juste après l’opération l’immunothérapie sous forme de traitements tels que la metformine, la sulfamine (avec précaution), les analogues de glp-1 et les inhibiteurs de dpp-4 ont des effets bénéfiques dans les mois qui suivent.

 

Session Malformations vasculaires : Polykystose et anévrismes intracrâniens.

 

Sur l’ensemble de la population la prévalence de l’anévrisme est très rare en touchant 3 à 5% des personnes. Dans la polykystose rénale cette prévalence s’établit à 9% et est plus élevée parmi les cas héréditaires, soit 20%. Toutefois, 80% des personnes qui ont vécu une rupture d’anévrisme n’ont pas d’antécédent familial. Elle est mortelle chez 40% d’entre elles et il est pratiquement impossible de la prévoir. L’âge médian observé est souvent jeune (40 ans contre 50 ans pour la population générale). La politique de dépistage est difficile à mettre en œuvre car, par la rareté de ces malformations on ne peut réaliser de ciblage efficace. Seuls dans les cas de PKD avec antécédent d’anévrisme on effectue les tests par :

Artériographie : méthode invasive

Angio IRM : 3 options : contrôle si faible risque de rupture (anévrisme de petite taille)

Traitement endovasculaire

Clipping si grosse taille de l’anévrisme

Tous les traitements préventifs comportent des risques et posent le problème de leur bénéfice. L’argument en faveur            du dépistage systématique, aujourd’hui simple et assez peu coûteux peut toutefois être mis en avant.

 

 

 

 

Florence Contré-Romuald

Martine

APKF, mai 2017

 

 

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