Le Pr Dominique Guerrot (CHU Rouen) est médecin néphrologue au CHU de Rouen. Son équipe se consacre à des travaux de recherche sur la polykystose rénale autosomique dominante et l’hypertension artérielle.
Dominique Guerrot et Jérémy Bellien ont été récipiendaires du prix de l’Association Polykystose France en 2014-2015. Après une implication constante dans les activités de l’Association, Dominique Guerrot a été élu Président du Comité Scientifique en 2024.
Dans cette séquence d’actualité, nous mettons en lumière deux travaux de l’équipe récemment parus dans la prestigieuse revue Kidney International.
Il s’agit, d’une part d’une revue des avancées internationales sur l’hypertension dans la PKRAD et sur les traitements actuellement recommandés et en développement (1), et d’autre part d’une étude originale qui soulève une piste innovante et très prometteuse pour le traitement de l’hypertension artérielle essentielle (HTA) associée à la PKRAD (2).
(1) Dumont A. et al., 2025, New insights in the pathophysiology and treatment of hypertension in autosomal dominant polycystic kidney disease, Kidney Int 23:S0085-2538(25)00572-1. doi: 10.1016/j.kint.2025.05.036
https://www.kidney-international.org/article/S0085-2538(25)00572-1/abstract
(2) Dumont A. et al., 2024, Chronic endothelial dopamine receptor stimulation improves endothelial function and hemodynamics in autosomal dominant polycystic kidney disease, Kidney Int 106(6):1158-1169. doi: 10.1016/j.kint.2024.08.020
https://www.kidney-international.org/article/S0085-2538(24)00626-4/abstract
Selon votre support préféré, vous pouvez lire un court résumé écrit de ces travaux, ou écouter un podcast d’une trentaine de minutes à leur sujet !
Il s’agit du premier volet de diffusion d’actualités scientifiques sous cette forme dans le site. Toutes vos suggestions d’évolution de la formule pour les éditions suivantes sont les bienvenues !
Article (2). stimulation chronique des récepteurs de la dopamine améliore la fonction endothéliale et l’hémodynamique dans la PKRAD.
Dumont A. et al., 2024, Chronic endothelial dopamine receptor stimulation improves endothelial function and hemodynamics in autosomal dominant polycystic kidney disease, Kidney Int 106(6):1158-1169.
Utilisation de l’intelligence artificielle : le résumé ci-dessous a été généré à partir du texte intégral de la publication par Copilot (Microsoft 365), puis révisé avant diffusion.
Il s’agit de l’une des études citées dans l’article de revue précédent (1), que nous développons ici plus en détail.
Et si le cœur du problème n’était pas seulement les reins ?
La polykystose rénale autosomique dominante (PKRAD) est bien connue pour provoquer des kystes dans les reins. Mais saviez-vous que cette maladie peut aussi affecter les vaisseaux sanguins et le cœur, même avant que les reins ne soient significativement perturbés ?
Pourquoi cela arrive-t-il ?
Les mutations génétiques responsables de la PKRAD perturbent des protéines appelées polycystines, qui jouent un rôle clé dans la façon dont les cellules réagissent au flux sanguin. Résultat : les vaisseaux perdent leur capacité à bien se dilater, ce qui peut favoriser l’hypertension et les complications cardiovasculaires.
La dopamine : un messager inattendu pour les vaisseaux sanguins
La dopamine est souvent associée au cerveau et à la motivation. Mais elle agit aussi sur les vaisseaux sanguins, via des récepteurs spécifiques appelés DR5 (type 5 Dopamine Receptor), présents sur les cellules endothéliales qui constituent la paroi interne des vaisseaux.
L’idée de l’étude est de tester l’effet de médicaments activant ces récepteurs à la dopamine DR5 sur le fonctionnement des vaisseaux sanguins. Chez les patients, la rotigotine, médicament déjà utilisé dans la maladie de Parkinson, a été administrée sous forme de patchs. Afin de vérifier que les effets observés étaient dus à une action périphérique et non sur le cerveau, l’étude a été complétée dans un modèle animal par un autre activateur du récepteur de la dopamine, le Fénoldopam, qui ne traverse pas la barrière hémato-encéphalique.
Que montre l’étude ?
L’étude a été menée sur 29 patients atteints de PKRAD, répartis en trois groupes : sans traitement, et avec patchs de rotigotine à faible dose (2 mg/j), et à dose plus élevée (4 mg/j).
Les résultats ?
- ✅ À 4 mg/j, la rotigotine améliore la dilatation des artères en réponse à la chaleur (un test du fonctionnement des vaisseaux sanguins).
- ✅ Elle augmente la production de monoxyde d’azote (NO), une molécule essentielle pour la santé vasculaire.
- ✅ Elle réduit certains paramètres de rigidité artérielle altérés dans la PKRAD, sans modifier la pression artérielle globale.
Un modèle expérimental très spécifique
Les chercheurs ont utilisé des souris génétiquement modifiées pour supprimer la polycystine-1 uniquement dans les cellules endothéliales qui bordent les vaisseaux sanguins. Cela permet de mimer les effets vasculaires de la PKRAD, sans interférer avec les autres fonctions rénales.
Le traitement par le Fénoldopam a permis :
- Une meilleure dilatation des artères.
- Une baisse de la tension artérielle.
- Une restauration de la structure des cellules endothéliales, observée au microscope électronique.
❓ Peut-on espérer de surcroît une amélioration de la fonction rénale ?
Pas encore démontré… (ce n’était pas le but de l’étude), mais :
Les chercheurs n’ont observé aucun effet négatif sur les reins, ni sur les marqueurs de croissance des kystes.
Et comme les récepteurs DR5 sont aussi présents dans les cellules rénales, on peut se demander si cette approche pourrait aussi freiner la progression de la maladie rénale, ce qui est hypothétique à l’heure actuelle mais sera exploré dans de futurs essais cliniques.
❓ Et maintenant ?
Cette étude ouvre une nouvelle piste thérapeutique pour les patients atteints de PKRAD : agir sur les vaisseaux sanguins, et pas seulement sur les reins. Il s’agit à ce stade d’une première étude, qui nécessitera des développements ultérieurs. A terme, ce type d’approche pourrait aider à prévenir les complications cardiovasculaires, qui sont fréquentes et parfois graves dans cette maladie.
Une étude plus longue est déjà en préparation pour tester la rotigotine sur 2 ans, avec un suivi de la fonction rénale et de la qualité de vie.